Aucune hésitation, encore moins de réflexion à outrance. Tout ce que tu veux, tu vois, c’est de la sortir du danger immédiat et si tu préférerais faire voler l’arme au loin, créant ainsi un véritable désavantage pour le type, et bah tu n’attends pas ce but. Tout ce que tu fais, c’est intercaler ta propre peau pour éviter que ce ne soit son cou qui soit tranché. Tu peux te permettre de perdre une main, Maleki, t’as déjà vécu pire, mais elle, c’est sa vie qui est en jeu.

T’essaies encore d’asseoir quelque chose, une forme de domination sûrement, pour qu’il comprenne que c’en est fini de ses folies, encore plus avec la blessure par balle qui continue de lui tirer son énergie hors de son corps. Et si tu cherches l’ouverture, quand agir sans mettre la brune en danger, c’est elle qui, soudainement, prend les devants. D’un seul coup, elle ploie en arrière, et tu sens la douleur augmenté dans ta main mais tu tiens bon. Le couteau lui échappe des mains et il s’éffondre au sol avec la furie qui se défendre avant d’aussi brutalement se relever et… se cacher dans ton dos. Toi, Maleki, t’es figé. Choqué presque. Dans ta tête, il n’y a que les battements sourds de ton coeur et tu ne reviens à toi qu’en entendant ses mots.

« Ne. Bouge. Plus. D’un. Pouce. Tu lui intimes d’un ton qui fait probablement un peu froid dans le dos. »

Tu t’écartes d’elle, sans même la regarder. Rapidement, comme si c’était une habitude flippante, tu te penches sur le cors de l’homme. De tes poches, tu sors des liens de plastiques, résistants, que tu serres fissa autour de ses poignets reliés et de ses chevilles serrées. Si tu vérifies son souffle, ou son rythme cardiaque, c’est sans y réfléchir. Et quand tu es sur que ce connard ne va plus rien faire, tu l’abandonnes comme… il n’était rien qu’un tas de viande inutile. Spoiler, il l’est à tes yeux.

Tu reviens à la brune, et ton visage l’air voir un mélange entre colère et sérieux. Tu es furieux ouais, mais contre toi, d’avoir laissé ça arrivé. Sans lui laisser le temps, tu relèves son menton d’un de tes doigts blessés et ta main métallique court sur la peau pâle de sa gorge.

« Tu vas bien ?! Tu lui demandes un peu abruptement, pas en état de te calmé. T’as une belle estafilade mais pas profonde. Faut désinfecter ça… maintenant. Tes yeux quittent son cou pour revenir à elle, et tu restes bloqué en silence, les yeux dans les siens bien trente secondes. Tu es en un seul morceau. Ca n’arrivera plus. Excuse-moi, je n’ai pas eu le temps de réagir… »

Tu devrais l’engueuler et te connaissant, Maleki, tu le feras mais quand vous serez hors de danger, dans la navette ou l’Alizé. Pour le moment, tu as simplement besoin qu’elle ne panique pas et qu’elle arrive à avaler ce qu’il vient de se passer. Tu refuses qu’elle déteste ce métier à cause de ton… incompétence. Alors tu finis par relâcher son menton, reculer d’un pas.

« Il ne peut plus rien faire, et s’il avait des copains, les coups de feu ont du les éloigner. Ses questions paniquées finissent par te revenir. Tu ne l’as pas tué, juste mis K.O. Si tu… veux toujours le soigner… tu peux. »

Parce que t’as bien compris que c’était sa vocation et que maintenant qu’il est sous contrôle, et qu’elle a besoin de se reprendre, tu ne veux pas te dresser face à sa volonté pour ça. Toi, par contre, t’a complètement oublié ta main, comme… toujours.

T’as eu peur, c’est un fait. Le truc, Maleki, c’est que tu ne peux pas simplement le reconnaitre comme ça devant elle. Parce que ce n’est ni l’heure, ni le moment, d’une part, et puis tu ne sais même pas ce qui te traverse exactement. T’as déjà craint pour la sûreté ou la vie d’un de tes compagnons, c’est un fait, mais jamais t’as eu l’impression de juste… t’éteindre un cours instant avant de réagir pour défendre. Et ça t’ennuie, cette histoire, il faut bien le reconnaitre.

« Tu as fait ce pour quoi tu es formée. Tu l’as dit toi-même, Ray, tu es une soigneuse avant d’être un soldat. Tu lui rappelles, et cette fois-ci, il n’y a ni critique ni colère dans ta voix. C’est presque dit sur un ton rassurant, alors que tu recules d’un pas. Pour les prochaines fois, reste en arrière le temps que je te le dis. Ca… Ca n’arrivera pas. »

Tu ne prononces pas les mots “je le jure” ou ce genre de connerie, mais il n’y a qu’à voir la puissance de ton regard sérieux pour comprendre que tu n’en penses pas moins. Le truc, c’est que finalement elle ne veut plus le soigner (tu peux le comprendre hein) et toi tu finis par commencer à te détourner pour regarder le type au sol. Difficilement soignable, encore plus pour le faire bouger. L’emporter avec vous, c’est traîné un poids mort qui pue le sang, alors ouais… il vaut probablement mieux le laisser mourir.

Ce que tu prévois pas, par contre, c’est qu’elle vienne t’empêcher de te retourner en attrapant ta main de cette manière. Tu t’arrêtes, tu fronces les sourcils avant de ramener tes yeux à elle, et quand son explication revient, tu restes figé, quelques secondes. Elle veut te soigner, beh tiens. Tu t’en doutes, hein, mais déjà t’aimes pas qu’on s’occupe de toi et puis il y a autre chose. Une promesse que tu lui as balancé à votre première rencontre. Alors tu finis par ricaner et secouer la tête, alors que tu viens regarder vos mains liées.

« Je vais mettre un bout de tissu dessus, ça suffira largement. Tu viens tirer sur ton bras, alors que cette petite entêtée, elle s’accroche aussi à toi. Sa remarque te fait même lever les yeux au ciel. Je te rappelle que je ne me laisse pas soigner comme ça. Tu as beau vouloir faire tes preuves, occupe-toi de tes collègues et de toi-même, ça m’ira. »

Ton sourire en coin réapparaît, alors que tu la provoques. Tu te doutes déjà qu’elle va râler, qu’elle va essayer de te convaincre et comme si tu avais oublié où vous êtes là maintenant, que ce type est en train de rendre son dernier souffle à côté ou que la faune pourrait vous attaquer, tu tires plus fort sur ton bras, pour le lever vers les airs, la tirant avec toi. T’as largement la force de la soulever de terre si elle reste obstinément accrochée à toi.

« Allez, commence par t’occuper de toi, on verra mon cas plus tard. Tu tentes pour la détourner de son idée. Si c’est moi qui te soigne, je suis bien capable de t’étouffer avec un bandage, crois-moi. »

T’es entêté. Elle est entêtée. Dans d’autres circonstances, il est fort probable que tu aurais pu en rire, continuant à la provoquer pour savoir qui d’entre elle et toi tiendrait le plus longtemps tête à l’autre. Ouais c’est certain. Le truc, tu vois, c’est que vous êtes au beau milieu de nulle part, que tu connais cette forêt pour être plutôt dangereuse et qu’il y a cette fameuse promesse dont t’es sûrement le te souvenir qui pulse dans ta tête. Alors tu t’entêtes, tu vas jusqu’à tenter de la convaincre de commencer par elle-même, avant de l’emporter vers les airs, en soulevant ton bras. Et là, tu restes bloqué, les yeux sur elle, à la regarder pendre à ton bras.

« Mais t’es vraiment pas possible, toi, nom d’un chien ! Tu comptes vraiment rester accroché comme ça longtemps ? Nan parce qu’on soit d’accord, Ray, je ne vais pas me fatiguer avant toi, hein. »

Tu triches, aussi, il faut dire, mais tu ne le mentionnes pas. À vrai dire, tu ne sais même pas si elle est au courant des… opérations que tu as pu subir. Tu l’observes juste avec un sourcil levé, alors qu’elle continue de râler et d’essayer de te convaincre. Le truc, vois-tu, c’est qu’en plus d’être obtus, bah tu es plutôt ingénieux et surtout tu ne te limites que très rarement dans tes actions.

« Descends, c’est mon dernier avertissement… »

Tu lui apprends, le plus calmement du monde, ton regard sérieux et pourtant un coin de tes lèvres s’étire sur un sourire moqueur que tu essaies de contenir. En réalité, tu ne lui laisses pas vraiment le temps de prendre une décision. Ou pas assez. Tout à coup, comme si c’était le truc le plus normal du monde, te voilà à bouger brutalement, comme si tu allais la faire voler mais en fait ton bras de métal ne vient que l’attraper et d’une traction puissante tu l’arraches de ton bras pour… non pas la reposer par terre, mais venir la charge sur ton épaule comme un simple sac de grain.

« On ne va pas rester ici plus longtemps. Lui, son sort est jeté, nous on va se bouger avant que les odeurs de sang n’attire les bêtes dans le coin. Et comme si c’était le truc le plus normal du monde, tu te remets en charge avec ton colis, vers là où vous étiez en route. J’aurais du faire ça depuis le début, c’est vachement plus rapide. T’ironises pour la provoquer, en plus. »

Elle te tient tête. Nan mais franchement, Maleki, t’aurais voulu trouvé quelqu’un d’aussi têtu que toi que tu n’aurais pas pu faire un choix meilleur. D’ailleurs, ttu ne l’as même pas choisi, la petite femme, c’est son père qui te l’a filé. Et il a eu le culot de te dire qu’elle savait se tenir… et bah, tu payerais cher pour voir sa tête à l’instant, alors qu’elle s’accroche à toi comme un singe.

Le problème, dans tout ça, c’est que ça t’amuse son comportement. Personne ne se permet jamais de te tenir tête, soit parce que tu fais trop peur, soit parce que tu es le supérieur. Elle, pourtant, elle s’en fiche. Elle n’a pas peur, et ton grade n’y change rien. Et tu mentirais sévèrement si tu ne reconnaissais au fond de toi que ça te plait, d’avoir une furie bornée à tes côtés. Ca donne… du goût à votre collaboration.

C’est pour ça, au final, que tu te permets d’être aussi “familier” ou “grossier” avec elle. Tu viens l’attraper et c’est sur ton épaule que tu la hisses sans peine avant de te remettre en route en ricannant comme il se doit. Et tu pourrais largement la trimballer comme ça un moment mais elle recommence à râler et ce n’est qu’en l’entendant parler de mordre que tu te figes à nouveau pour la reposer à terre, oui, mais la garder immobile d’une main puissante sur ton épaule.

« Ce serait une bien mauvaise idée de jouer à ça avec moi. Si d’autres savent se tenir, ce n’est pas mon cas. Si tu me mords, j’en ferai pareil, qu’importe que tu sois une femme, sous ma protection ou mes ordres. Ton regard brille d’intérêt, de menace et de défi liés. Je te laisse par terre, si tu me lâches la grappe avec ma main. Je ne veux pas de soin. Pas maintenant en tout cas. Et je suis solide… Et je t’ai promis que tu ne me toucherais pas si facilement, probablement aussi. »

Tu lui rappelles la promesse sans y penser, avant de planter ton regard dans le sien. Pendant quelques instants, c’est comme si tu allais la relâcher et te remettre en route mais tu fais autre chose. Toujours en la retenant de bouger, tu viens te pencher vers elle, jusqu’à ce que tes yeux soient à son niveau, ton nez presque contre le sien.

« Je sais que tu veux faire ton travail, Ray, mais moi j’ai mes principes. Tu lui expliques presque gentiment. Si on arrive pas à temps et qu’on doit passer la nuit dans les arbres, je te laisserai faire tout ce que tu veux… Ok ? »

Un deal, pour tenter de calmer le jeu. Tu es persuadé que tu vas trouvé ce groupe d’animaux avant la nuit et que tu pourras ainsi t’en sortir sans son aide. Tu oublies deux choses, Maleki : Ray n’avance pas à ton rythme, d’une part, et de l’autre, cette rencontre malvenue vous a largement fait prendre du retard sur votre objectif…

En fait, Maleki, tu étais persuadé qu’entre vous deux, tu lui étais supérieur. Tu pensais être plus entêté, plus obtus qu’elle. Tu croyais aussi être celui au plus mauvais caractère, à s’enflammer en premier. Sauf que si tu tiens bon, tu vois, que tu ne comptes pas lui donner ta maintenant, mais que tu lui offres quand même un entre deux, et bien quelque chose. Parce que toi, t’es sérieux (en même temps à par l’ironie, tu ne sais pas manier l’humour hein), mais ça t’amuse encore cette histoire. Elle, elle s’enflamme sur ton épaule. Et ça te coupe l’herbe sous le pied, mon vieux, alors qu’elle s’en prend à toi, à tes principes et… ouais, même à ta fierté visiblement mal placée.

Ca te laisse tellement sur le cul, son enragement, que tu finis par la faire retomber au sol, et si tu t’étais penché vers elle, tu recules d’un pas. Ton regard devient distance, se refroidit, alors que tu la laisses continuer à ordonner ce qu’elle veut. Et c’est quand elle en finit que tu prends de longues secondes, pour sortir de ton immobilité de statue grognantes (ouais parce que par contre, t’en fais du bruit, là) et tu viens pincer l’arrête de ton nez quelques instants avant de répondre, enfin :

« Il n’y a absolument aucun risque pour une entaille à la main, gamine. Que tu claques d’un ton vraiment glacial, tes yeux redevenus de la glace solide. Que tu ordonnes ce genre de choses parce que je me vide de mon sang ou de mes tripes, j’entends, mais là, tu présumes un peu trop. Alors on va faire un truc simple : descend de tes grands chevaux, et peut-être que je mettrai ma “fierté de mâle sacrément mal placée” de côté. »

Oh non, ça ne te plait pas du tout, cette manière qu’elle a choisi de te parler. Ce n’est même pas parce que c’est elle, hein. Tu ne supportes ça de personne, tu détestes la condescendance de ceux qui se croient supérieurs. Et tu vois, si un instant, tu tournes la tête vers le chemin où vous devez avancer, tu finis par lui tendre ta main blessée, en revenant la fixer durement, comme pour la mettre à l’épreuve de ta colère.

« Fais ce que tu veux, mais maintenant, sois assurée que je me souviendrai toujours bien de ta position de médecin. Tu resteras en retrait, tu nous attendras en sécurité. Tes lèvres s’étirent sur une expression qui n’annonce rien de bon. Tu vas la mettre de côté pour la frustrer, pour lui voler le plaisir d’explorer. Parce que t’es un putain de sale con. J’ai pas besoin de te virer de l’équipe pour te faire vivre un enfer si je le veux, Rayven. Si tu crois ça, alors tu n’as définitivement pas compris qui j’étais. »

Tu le sens au fond de toi, hein, Maleki, mais tu réagis comme un animal blessé. Tu attaques pour te défendre, pour repousser. Et tu l’es, blessé, d’une certaine manière. Parce que tu commençais à lui faire confiance, peut-être même à l’apprécié, mais ses mots, sa dureté, son arrogance, ça vient juste exploser dans ce manque flagrant de confiance en les autres que tu portes en toi. Alors tu te refermes, comme un vieux coquillage à la con, prêt à reprendre la marche, à ton rythme, dès qu’elle en aura fini.