Grogner. Grogner encore. Grogner toujours. Autant dire que c’est pas que tu considérais ta dernière mission comme un échec (quoique), mais que ton humeur était descendue au plus bas avec les conneries qu’on vous avait servi à la louche. Donc ouais, tu avais fini par simplement planté tout le monde en disparaissant à grands pas, en continuant de ruminer tel le boeuf en charge que tu pouvais être dans ces moments-là.

Ce n’est qu’en arrivant vers l’armurerie, pas changé, pas douché, pas remis sur pied, que tu cesses d’émettre ces bruits de cochon pour t’arrêter un instant et respirer. Tu te calmes en surface. D’un seul coup, tu ravales tout en toi, pour faire comme si rien n’était arrivé et que tu étais le type le plus calme du monde (grosse blague) et tu passes la porte, bien décidé à y laisser rapidement tes armes consignées avant de… t’en sais rien, aller t’entraîner dans un coin pour te calmer sûrement.

Le truc, tu vois, c’est qu’il y a déjà de l’attente, et si en silence, presque discret comme tu ne l’as jamais été, tout ça parce que tu boudes et que tu ne veux voir personne, tu vas t’installer dans un coin, ton regard attrape une forme connue. Un homme que tu as déjà vu, bien trop récemment. Tu retiens un soupir, détournes les yeux en espérant que ça suffise pour qu’il ne vienne pas te parler et tes oreilles affûtée se mettent à trainer pour faire passer le temps.

Autant dire, mon vieux, que tes sourcils se froncent quand tu captes à peu près la teneur de la discussion qui se tient. Ta méfiance naturelle ressurgit et si tu es sur le point de relever la tête pour observer l’interlocutrice, un nom te fige. Swann Dixon. Même pas de doute possible, tu sais de qui il s’agit et ça vient littéralement te tordre les tripes. Ca et Grimms encore une fois prononcé en peu de temps. Ça suffit pour te mettre en pelote de nerfs.

Tant et si bien, Maleki, que lorsque l’on appelle le suivant à l’armurerie, tu démarres comme une brute. Tu doubles Charlie sans même une once de remord et c’est à la limite si tu balances pas ton chargement à la personne en charge de l’endroit. En tout cas, tu expédies ça, le regard tempétueux qui coupe le sifflet de l’autre et quand tu ressors, tes yeux se posent sur le soldat. Brûlant. Mécontent. Plein de doutes. Maintenant, tu le vois sous un autre oeil et tu as clairement l’air suspicieux.

« C’est à toi. Que tu lui grognes, comme si tu ne l’avais absolument pas doublé. A bientôt… Ackermann. »

Ca pourrait sembler civiliser dans ta bouche hein. Mais le ton est étrangement glacé, comme tes yeux qui ne l’ont toujours pas lâché. Et tu ne dis rien de plus. Tu ne l’interroges pas, tu ne forces même pas pour savoir ce que Swann a affaire avec lui. Nan, t’as juste noté leur rendez-vous de briefing dans un coin de ta tête, et autant dire, Maleki, que tu vas être intenable jusqu’à y être.

Parce que ouais… tu comptes bien aller y fiche ton nez, pour une fois.

Deux jours, c’est long pour toi. Autant dire que tu as été d’un emmerdement incroyable pendant l’attente. Tu as saoulé toute ton escouade, à être sur leur dos pour qu’ils s’entrainent, pour qu’ils s’occupent de leur matériel ou ce genre de trucs. D’habitude tu es chiant, c’est un fait, mais là, tu t’es surpassé, tout ça parce que tu n’as cessé de ressasser, d’hésiter, de douter. Pis finalement le matin vneu, tu leur as annoncé que tu avais à faire et qu’ils avaient quartier libre et t’as… disparu, tout bonnement.

T’as pas envie de te mêler de la vie des autres, c’est un fait. Mais Swann est la seule personne de ton sang à laquelle tu portes un tant soit peu d’affection. Grimms est lié à l’affaire et tu commences à l’avoir salement dans le nez. Pis il y a ce truc, au fond de tes tripes, qui te dit que tu dois t’en mêler, vérifier ce que la jeune femme fouine avec un soldat, pour l’ARA en plus. Du coup, ouais, ça te gave déjà de te mêler de tout ça, mais t’es trop curieux, trop entêté, donc tu rejoins les couloirs du vaisseau sans hésiter plus longtemps.

Autant dire, mon vieux, que lorsque tu passes la porte de la salle de briefing réservée, la seule du coin, tu affiches un visage d’un calme surprenant. Sérieux, oui, mais tes yeux brillent d’une sacrée lueur. Tu vas être mordant, emmerdant. Quand tu as ce truc en toi, tu deviens le pire entêté de la flotte, tout le monde le sait. Et si ces deux là ne t’ont peut-être jamais vu comme ça, ils vont… et bien faire avec !

« Salut. Que tu lances, en laissant la porte se refermer sur toi, alors que tu parviens enfin à tilter les paroles qui se sont échappées de la bouche du soldat pile quand tu entrait. Follement amoureuse ? T’as décidé de ta caser, Swann ? »

Et si tu adresses un regard quelque peu amène à Charlie, comme pour le mettre au défis de se déclarer devant ta cousine, tu t’avances dans la pièce, en ramenant ton regard glacé dans celui de la jeune femme. Ton expression obstinée, presque coincée, font quelques instants pour devenir plus agréable. Tu lui offres même un très léger sourire et hochement de tête, avant de t’asseoir à la table de réunion, comme si c’était le truc le plus normal du monde.

« J’ai raté quoi de beau ? Vous allez faire quoi sur le Mercure ?Et t’es vraiment le pire des connards, hein, parce que tu comptes bien t’incruster mais sûrement leur remuer la cervelle au passage, en faisant comme si c’était prévu de longue date. Parait que vous avez besoin d’une troisième paire de bras, vous avez de la chance que j’étais libre, sinon c’était un gros con qui allait prendre la place. »

Comme si tu étais mieux que ça. En tout cas, te voilà à les observer à tour de rôle, pour jauger leur réaction, et puisque tu n’es pas le plus patient des types (t’es pas grand chose, à vrai dire), tu finis par tendre la main sous le nez de ta cousine pour essayer de lui piquer le dossier sous son nez.

Bien entendu que tu te pointes comme une fleur et qu’en plus tu as le toupet de faire comme si c’était le truc le plus normal qui soit. Vraiment Maleki, si tu sais qu’avec d’autres, ça peut marcher, surtout ceux qui ne te connaissent pas assez (ou qui en savent trop sur toi), mais tu oublies deux choses : Swann t’es hiérarchiquement supérieure, d’une part, et elle a toujours eu le cran de se dresser contre toi, sans crainte. Pas que tu ne l’emmerderais pas si elle te cherche hein, juste que visiblement ça ne lui fait pas peur. C’est pour cela, aussi, que tu la respectes sincèrement. Pour elle, pas pour son rang.

« Oh sérieux, Swann ? Te voilà à lâcher un gros soupir alors qu’elle t’ordonne une première fois de partir. Tu vas vraiment me servir du Omega Lamorac ? T’as pas un peu plus sympa et piquant ? »

Et oui, en plus de ne pas bouger d’une once tes fesses, tu te permets même de venir la piquer, avec ce léger sourire en coin, comme tu adores le faire pour emmerder le monde. Et si tu es toujours bien décidé à savoir ce qu’ils fichent là, tous les deux, c’est quoi leur fameuse mission où le nom de Grims a été prononcé (au delà du fait qu’il est maintenant le boss de ta cousine), elle râle encore. Elle te remet à ta place, gronde, te retire même la tablette des mains. Et toi, peu à peu, ton regard devient de plus en plus orageux. En fait, il est fort probable que tu te serais emporté, la menaçant de saboter sa mission par simple entêtement de ton côté, quand le soldat se remet à parler et tu tournes d’un coup la tête vers lui. Tiens, tu ne t’y attendais pas.

« Tu me plais bien, toi. Que tu finis par lâcher, avec un drôle d’air sur le visage, quand il finit de te cracher le pitch et que te voilà à hocher la tête. Charlie c’est ça ? Dommage que tu sois un soldat, je t’aurais bien récupéré dans mon escouade. Bref sourire, tes yeux reviennent à Swann et tu prends une expression de triomphe. Tu vois, ton copain, au moins, il réfléchit plus loin que le bout de son nez. Je m’en fiche de pas être nommé sur la mission, j’ai décidé que je viendrai, que je voulais savoir ce qu’il en est. Et j’commence à en avoir plein le dos, d’entendre parler de l’autre empaffé qui te sert de supérieur. »

Respect 0, tact -100. Tu finis même par te remettre sur tes pieds, repoussant Charlie qui s’est un peu trop approché de toi, de ton bras métallique, sans violence, mais avec fermeté. Tu finis par faire bouger tes épaules, ton cou, avant de croiser les bras sur ton torse et comme si c’était clairement décidé, tu reviens à la charge :

« Du coup, je viens. C’est quoi vos couvertures, du coup ? Que j’vous fasse pas tout foiré non plus. Et tu viens à nouveau ramener ton regard bien trop obstiné sur la brune, avant de rajouter, comme pour la forcer à rejoindre l’avis de son… t’en sais trop rien pour le moment. De toute façon, petit Kavats, je vais vous filer le train, autant m’intégrer à votre truc, plutôt que je vienne tout gacher, nan ? »

Et franchement, t’es le pire. T’as toujours eu un sale tendance à filer des surnoms nuls aux gens. Tu sers du gamine ou gamin à tout vas, mais ta cousine, tu as bien vu qu’elle aimait pas. Alors tu t’es amélioré, tu as cherché encore pire. Et c’en est venu à ça, un petit chat sauvage des jungles. Tu es déjà curieux de voir sa réaction, encore plus de Charlie…